Mettre en place un changement quand on n’y « croit pas » – que peut-on faire?

Dans quelle mesure peut-on mener une mission avec aisance lorsque l’on doute de sa valeur, de son sens ou de son impact positif ? Cette question peut bien entendu se poser dans tous les métiers, mais il me semble qu’elle prend une dimension particulière lorsqu’on occupe un rôle de « porteur de changement », chargé de mettre en place des transformations et d’aider les personnes à s’y adapter.

Tenaillé entre le besoin d’être fidèle à ses convictions et celui de faire son travail, on peut naviguer entre plusieurs attitudes.

Certains expriment plus ou moins ouvertement leurs réserves, au risque de décrédibiliser le projet ou de se mettre en difficulté. D’autres appliquent les plans de changement de manière mécanique, sans y mettre d’énergie ni d’engagement. Mais dans les deux cas, le résultat est souvent le même : une perte de motivation, un manque d’impact et une mise en œuvre fragilisée. À terme, si ces situations se répètent, elles affectent non seulement la réussite des projets, mais aussi le sens même du travail.

Alors, existe-t-il une alternative plus satisfaisante ? 

Explorer les oportunités d’apprentissage

Questionner avec curiosité

Interrogez les décideurs ou les sponsors sur l’origine et la pertinence du changement :

  • À quel besoin répond-il ?
  • Pourquoi cette approche et pourquoi maintenant ?
  • Quels sont les bénéfices attendus, les limites, les risques en cas d’inaction ?

L’objectif n’est pas nécessairement d’adhérer au projet, mais d’élargir la perspective et de mieux comprendre la complexité du contexte. Ces échanges permettent souvent de nuancer son point de vue et d’identifier des leviers d’action plus pertinents.

Le growth mindset (Carol Dweck) nous invite à ne pas figer nos jugements dans une vision rigide de ce qui est « bon » ou « mauvais », « vrai » ou « faux ». Une compréhension plus fine du contexte révèle souvent que la réalité est bien plus nuancée que ce que l’on percevait au premier abord.

Transformer ses résistances en leviers

Nos doutes et nos réserves ne sont pas nécessairement un frein : ils peuvent devenir un moteur de développement. Ils pointent souvent vers des questions essentielles et offrent une base précieuse pour enrichir les discussions avec les parties prenantes.

En reconnaissant ces résistances, on peut les utiliser pour affiner l’approche, identifier les risques sous-estimés et proposer des ajustements pertinents qui renforceront l’efficacité du changement.

Exprimer ses réserves avec justesse

Ce point est rarement mis en avant dans les théories du changement, mais il m’a souvent été utile. Plutôt que de rester neutre ou d’occulter ses doutes, il peut être bénéfique de les partager avec mesure.

Il est parfois possible de dire franchement : « Cette approche me semble imparfaite, j’ai aussi des doutes, et pourtant nous devons avancer ensemble ». Cette posture authentique favorise des échanges plus sincères avec les parties prenantes, tout en évitant d’entrer dans une posture défensive face aux critiques.

Bien sûr, exprimer ses réserves demande de la finesse. Cela nécessite de trouver le bon équilibre entre transparence et responsabilité, sans nuire à la dynamique du projet. C’est une compétence qui s’affine avec l’expérience et qui peut être un réel atout pour instaurer un climat de confiance.

Conclusion : Trouver l’équilibre entre convictions et flexibilité

Être porteur de changement ne signifie pas imposer une vision ni s’effacer derrière une neutralité de façade. Il s’agit plutôt de trouver un équilibre entre authenticité et ouverture, entre conviction et flexibilité. Vous devenez alors un modèle de changement positif.

Lorsqu’on parvient à intégrer cette posture, on devient un acteur du changement plus crédible, plus ancré et plus à même de naviguer dans la complexité humaine qui accompagne toute transformation. Plutôt que de subir les projets, il devient alors possible de les influencer de manière constructive et d’y apporter une valeur qui fait sens, à la fois pour soi et pour l’organisation.

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